La grâce des choses qu'on ne dit pas

- Maintenant, tu vas voir Sacha, dit Kephren sans s’arrêter de marcher. Elle souriait fièrement en attrapant Salomé par le bras dès qu’ils croisaient quelqu’un pour le traîner à travers le dédale de couloirs.

Sachant son amoureux complètement hermétique aux pratiques magiques, elle ne voulut pas trop l’alarmer en lui stipulant que le Sacha en question allait lui fouiller la cervelle comme c’était de coutume pour les proches de la Résistances qui bossaient au QG.

Ils arrivèrent près de la salle commune aux Résistants. Quelques personnes travaillaient studieusement sur la table centrale. Enki faisait partie du groupe. Il vint à leur rencontre et tendit chaleureusement sa main à Salomé. Sa venue était attendue depuis que Kephren avait envoyé un hibou après que Salomé eût accepté de faire partie du mouvement.

Enki lui demanda s’il comptait devenir un jour adjuvant. Kephren en profita pour lui expliquer la hiérarchie au sein de la Résistance et l'organisation générale.

- ... et donc ici, c’est le big QG, concluait-elle tout en marchant vers le bureau de Sacha. Rares sont ceux qui peuvent y venir ou qui savent où il se trouve. C’est le lieu où se rencontrent les adjuvants, les majors et autres gradés. Tous les pays possèdent un QG qui est rattaché à celui-ci. L’Amiral, Sacha, dirige et insuffle la politique de tous ces QG ainsi que celui du Royame-Uni. Il est jeune mais très débrouillard et plutôt sagace. Tu verras...

Ils atteignirent la porte. Enki frappa et invita le jeune couple à entrer. Sacha était assis à son bureau et s’amusait à faire planer un château de cartes en équilibre pour amuser Noah qui le regardait avec émerveillement assis sur ses genoux. Enki les introduisit puis les laissa seuls.

Sacha se leva et déposa son fils sur le sol. Le garnement vint dans les jupons de Kephren pour réclamer un bisou qu’elle lui donna sur le front... un peu maladroitement. Elle n’avait pas l’habitude des enfants.

Le petit homme hésita avant de rebrousser chemin face à l’inconnu que représentait pour lui Salomé. Il gambada jusqu’aux jambes de Sacha qu’il ne lâcha plus jusqu’à la fin du rituel.

Salomé ne vit rien venir. Sacha lui avait serré la main sans décrocher son regard du sien. Il en avait profité pour scanner la mémoire du moldu sans rien laisser paraître. Quand l’opération fut terminée, il sourit à Salomé et Kephren. Kephren savait que Sacha devait avoir « aperçu » la raison de leur retard. Ils étaient attendus depuis trois jours et ne se présentaient que maintenant. Il n'en fit aucune grivoise mention et s'astreint aux civilités habituelles :

- Bienvenue dans la Résistance, Salomé. Merci pour ce que tu as fait pour Baten Kaïtos... Enki m’a raconté.

Kephren souriait bêtement. Elle était tellement fière. Il n’y avait pas de sourire plus bête que le sien. Comme les parents dont les enfants vont être diplômés après de longues études. Ils discutèrent tous les trois encore un peu. Sacha se renseigna sur le type de missions que Salomé comptait accepter car il en avait deux à venir que lui-même ne pourrait pas honnorer. Kephren et Salomé se disputèrent sur le fond mais, dans la forme, l’un et l’autre avaient l’air d’accord. Où qu'on les envoie...

- On veut des missions ensemble.


Plus tard, le couple était revenu chez Salomé. Un silence religieux se mit à table avec eux. Le français cuisinait délicieusement... Kephren savoura sans un mot. Des pensées un peu lourdes l'accaparaient.
Ils s’endormirent dans le même silence. Salomé n'eut le droit au fin mot de ce drôle de silence que sur l’oreiller. Leur tête se posa, l'édredon les recouvrit, des bras s'enlacèrent et un baiser entama la discussion nocturne. Elle lui confessa enfin ce qui la chagrinait depuis son investiture au sein de la Résistance :

- Salomé... je t’aime vraiment très fort et ce que tu as accepté aujourd’hui... c’est... enfin personne n’avait jamais... heu... pour moi... enfin, tu vois... je... merci. Je sais que tu n’as pas envie d’être dans la Résistance et j’ai fait celle qui ne comprenait pas mais je sais... et je ne l’oublierai pas. Je t’aime pour ça. Pour ta connerie et ton inconscience. Je t’aime, le moldu.


La nuit les recouvrit de tendresse et d’un profond silence.
Au matin, déjà, on les contactait pour une mission infernale au cœur de la Pennsylvanie.


- Salomé, debout ! On va à Pittsburg !
- Nan...
- Oh que si ! Lâche cet oreiller ! C'est génial ! Notre première mission officielle tous les deux !
- C’est pour quoi ?
- Des loups-garous vicieux qui ont enlevé la chef de la Résistance Colombienne.
- Ah ! Non ! C’est dimanche ! Pas de sauvetage le dimanche ! Rends-moi cet oreiller !

Dispute, mamours, transplanage, râlage, baston et sauvetage. Un couple dans l’air du temps.